• « La Réunion porte bien son nom : l'île de la rencontre des communautés »


    François Bayrou est venu à l'été 2006 à l'invitation du maire de Saint-Louis, Cyrille Hamilcaro, et revient en décembre, « simplement à la rencontre des Réunionnais », entrepreneurs, militants, jeunes - sur une île exemplaire par sa volonté de prendre sa place dans le monde nouveau, mais frappée par la crise du chikungunya.


    « Je suis très attaché à La Réunion pour l'expérience qu'elle incarne, l'exemple que ce département représente : la rencontre de communautés. J'aime y rencontrer des Français très actifs et très entreprenants, une jeunesse qui bouge et n'hésite pas à partir étudier loin de chez soi, au Canada ou en Australie, par exemple. Ancien ministre de l'Éducation, je suis très sensible à ce dynamisme, à cette volonté d'apprendre et se former au monde nouveau.

    Il y a ici des chantiers très importants sur le plan des financements publics, comme le tram-train et la route des Tamarins. Ils seront soutenus dans le cadre d'
    un Etat impartial, au service de tous les citoyens : cet Etat républicain qui a fait défaut à nos Départements d'Outre Mer plus encore qu'ailleurs sur le territoire français.


    La génération des responsables politiques actuels est une génération dont l'avenir est derrière elle. Ce qui ne m'empêche de considérer que sur le fond, ils avaient raison, lors des combats contre la bidépartementalisation, ou pour une meilleure utilisation des contributions sociales en faveur de l'emploi.


    C'est Anne-Marie Payet, sénatrice UDF de la Réunion, qui a parlé la première du chikungunya au Parlement français, dans l'indifférence générale.


    Je n'ai pas de reproche grave à faire à la façon dont le gouvernement s'est conduit dans cette affaire. Il a fait ce qu'il pouvait faire - un peu tard. Il y a eu un chahut à l'Assemblée nationale parce qu'un parlementaire, socialiste en l'occurrence, a dit "si cela avait été un département en métropole, on se serait bougé plus vite" : ce parlementaire disait la vérité. L'éloignement a des inconvénients : le principal, c'est que 'loin des yeux loin du cœur', ou loin de la raison de ceux qui gouvernent. C'est pourquoi il faut des représentants politiques qui soient suffisamment influents, c'est-à-dire suffisamment indépendants, pour qu'on les entende."


  • "On est au bord de la désertification médicale dans de nombreuses régions : il faut une politique active de restauration du tissu médical"


    François Bayrou a présenté sa vision de la politique de santé en conclusion d'un colloque intitulé "Quelles stratégies pour la santé ?", qui s'est tenu en novembre 2005. Une consultation par questionnaire, à laquelle 11 200 médecins ont répondu, alimentait cette réflexion.


    "Les quelque 200 000 médecins français représentent un gisement de compétences, de connaissances, d'expérience scientifique et humaine à nul autre pareil. Ils ne demandent qu'à participer à l'élaboration des évolutions nécessaires. Il faut institutionnaliser la participation des médecins à la réflexion et à la  décision, changer les pratiques professionnelles de décideurs habitués au secret et au soupçon


    Il faut donner à la gestion de nos politiques de santé une dimension régionale pour que les besoins de santé soient identifiés, qu'ils obtiennent une réponse adaptée, que puissent y participer des partenaires légitimement représentés.


    On est au bord de la désertification médicale dans de nombreuses régions, dans un certain nombre de spécialités.


    Il faut une politique active de restauration du tissu médical. Au temps lointain où il fallait restaurer le tissu des professeurs, on inventa les Instituts Préparatoires à l'Enseignement Secondaire (IPES), qui garantissaient à des étudiants un revenu pendant une partie de leurs études, pourvu qu'ils souscrivent l'engagement de servir dix ans dans la fonction publique : une politique du même ordre, incitative, peut être imaginée pour le tissu médical français.


    La permanence des prises en charge, de jour et de nuit, est une demande croissante. La participation des médecins généralistes est nécessaire. Cela impose l'implantation de maisons médicales, qu'on a pourtant, financièrement, récemment abandonnées.


    Je crois peu au médecin traitant comme distributeur de ticket d'accès gratuit au spécialiste, mais  je crois beaucoup au médecin traitant comme acteur et responsable de la prévention."


  • « La sécurité, cela commence par la présence de l'État là où ça va mal. »


    L'insécurité dans les quartiers qu'on nous montre en flammes à la télévision est, pour François Bayrou, le révélateur d'une menace d'implosion de toute la société française.


    « Aux grands maux, les grands remèdes ! La sécurité est le premier devoir de l'État à l'égard des citoyens. L'échec à assurer la sécurité des Français est l'échec majeur de la période récente. 


    On a appris que les policiers avaient pour consigne de ne pas entrer dans la cité des Tarterêts ! On est loin de la ‘tolérance zéro' ! Il faut inverser notre  politique : réimplanter l'Etat au cœur de ces quartiers, pour y incarner la sécurité et le service public. Pas seulement la police de proximité, mais aussi l'Etat de proximité, l'Etat qui protège et qui aide.


    Sanctionner tôt, dès le premier délit, serait bien souvent la meilleure prévention (il est absurde de séparer prévention et sanction) : face à la délinquance juvénile, la sanction doit être ultrarapide et éducative. La prison est une impasse, un pourrissoir, on en sort caïd : je suis pour des sanctions qui remettront le jeune au contact de l'autorité : rigoureuses et éducatives. Les travaux d'intérêt général surveillés deviendront une obligation, avec l'encadrement  correspondant.


    On rendra systématique un principe de réparation du tort causé à autrui ou à la collectivité. Une loi sera votée pour la protection des victimes contre les représailles. 


     Je proposerai que le maire ou le président de l'intercommunalité - seul responsable accessible et identifiable par le citoyen - ait autorité sur la police de proximité.

     

    La prévention commence par la famille : quand j'ai donné cette claque à Strasbourg, j'ai reçu des milliers de lettres, dont beaucoup de parents immigrés. Ils me disaient : ‘Vous avez bien fait, mais si nous donnons une claque, c'est l'assistante sociale'. Il y a un immense effort à conduire pour l'éducation des parents ! Quand il y a abandon de toute responsabilité, les allocations familiales doivent pouvoir être mises sous tutelle.  

    L'école est la clé. Victor Hugo le disait : ‘Ouvrez une école, vous fermerez une prison'. Si l'école donne de l'espoir, le quartier est sauvé. Au collège, il faut enseigner la loi. On doit sortir du collège les jeunes qui déstabilisent leur classe : il faut des structures scolaires de recours, de petite taille, avec une pédagogie adaptée et une surveillance renforcée.  
     

    La loi doit être la même pour tous. Il faut donner l'exemple, au plus haut : je suis contre le principe d'amnistie lié à l'élection présidentielle. »

  • « Retrouver de la cohésion sociale : dans les faits, dans la vie, pas dans les mots. »



    La révolution civique dont le pays a besoin passe par la création d'un service civique universel pour tous les jeunes, instrument d'apprentissage de la vie en commun et du service aux autres. C'est la proposition que François Bayrou a été le premier à faire dès 2001 et pour laquelle il continue à se battre.


    « Pour tous les jeunes, garçons et filles, je défends depuis 2001 l'idée d'un service civique et humanitaire de six mois, temps de brassage, d'apprentissage et
    de service aux autres. Ce service concernera à la fois les jeunes Français et les jeunes immigrés qui ont grandi en France. Pour ceux-ci, l'accomplissement de ce service sera une clé de l'attribution de la nationalité française.


    Les jeunes ont le plus grand besoin de sortir de leurs ghettos, ghettos de jeunes pauvres ou de gosses de riches. Ils ont besoin de rencontrer des jeunes d'autres milieux sociaux, de bouger, de sortir d'une société obnubilée par la seule consommation, de donner quelque chose d'eux-mêmes à la communauté.


    En donnant six mois à la société pour des actions civiles et humanitaires, en France, en Europe ou dans les pays en voie de développement, ils en retireront un immense bénéfice humain. Il va de soi que ces acquis pourront être pris en compte dans leur parcours de formation », qu'il s'agisse de la validation des acquis de l'expérience ou d'unités de valeurs dans le cadre des études universitaires.


    « De nombreux domaines ont besoin de ce don de quelques mois : la sécurité dans les transports en commun dans les grandes agglomérations, la surveillance des massifs forestiers au plus brûlant de l'été, l'aide aux personnes âgées, handicapées ou à mobilité réduite, l'assistance ou la sécurité des personnes fragiles dans les gares ou les aéroports. Cela coûtera cher - quatre ou cinq milliards d'euros - mais il faut le faire. A tous les points de vue, c'est une nécessité urgente. La décision de créer ce service civique universel réclame une légitimité forte, indiscutable. Elle sera soumise  à référendum»


  • « Instaurer un service garanti en associant la loi et la négociation »


    Le service public symbolise et réalise le lien social. C'est l'un des piliers de notre modèle français. Pour le sauvegarder, François Bayrou juge nécessaire la définition d'un service minimum garanti dans les transports.


    « Le droit de grève est une liberté fondamentale, une grande conquête du mouvement ouvrier. Nul ne saurait remettre en cause ce  droit démocratique qui, cependant, ne doit pas entrer en contradiction avec d'autres libertés fondamentales, non moins chèrement acquises. Ainsi de la liberté d'aller et venir, liberté essentielle qui permet à chacun de mener à sa guise sa vie privée, professionnelle, sa vie de famille, sa vie d'étudiant ou de retraité.


    Un pays moderne, a fortiori  riche d'histoire républicaine, ne peut défendre la notion de service public, que s'il assure une part de service garanti. Sans cet effort, sans une telle réforme, la notion même de service public sera piétinée. Nous n'échapperons pas à cette question. De grands pays européens ont su le faire, sans renier les grandes traditions sociales qui sont les leurs.


    Je défends l'instauration d'un service garanti pour les transports publics réguliers de voyageurs. Cette réforme sera menée en associant la loi et la négociation dans les entreprises. La loi formera un cadre, se bornant à fixer les règles de la garantie de service public ; on donnera le temps nécessaire à la négociation, dans chaque entreprise, dans le cadre de cette loi. Il est essentiel de laisser aux partenaires sociaux la possibilité de définir les modalités pratiques d'application, par le dialogue social entre syndicats et directions.


    En garantissant une continuité minimale du service public, on assurera la solidarité entre les Français et entre les territoires : deux actions de nature à  renforcer la cohésion sociale. »