• Bayrou et le gaullo-centrisme (source : Marianne paru le 25 janvier)

    Par Pierre Kerjean, cadre commercial, Nîmes.
    Les valeurs gaulliennes, le seul homme susceptible de les porter au plus haut à l'heure actuelle, c'est François Bayrou. Le Gaullisme retrouve la place qu'il n'aurait jamais du quitter : le centre. Le centrisme mou, objet politique non identifié d'opportunistes tourneurs de veste est mort. Vive le gaullo-centrisme.


    Les partis vivent un temps et meurent un jour. Nouvelles tendances idéologiques, nouveaux contextes historiques, stratégiques, hommes providentiels, tout un tas de raison concourent à l'amoindrissement d'influence voire à la disparition d'appareils qui, hier encore, semblaient incontournables dans le paysage politique. Ainsi il faut un minimum de connaissance historique pour savoir que le minuscule et malgré tout éparpillé de gauche et de droite, mouvement radical, repère de notables en réserve de gamelle, fut, sous la troisième république une redoutable machine de guerre républicaine dont le « gauchisme » consistait à tirer sur les ouvriers en leur faisant bouffer du curé pour oublier leurs fins de mois faméliques. De la même manière, il faudrait beaucoup d'imagination à un assidu de la star'ac (oxymoron ?) ou des mégères américaines désespérantes pour visualiser un PCF rayonnant de toute sa pourpre puissance, acidifiant les sucs gastriques du gros actionnariat français et opacifiant la lucidité des intellectuels de droite. Même Aron en perdait ses neurones.

    Il faudrait carrément du génie créatif à un adolescent d'aujourd'hui pour imaginer ne serait-ce qu'un instant le fil conducteur supposé relier un géant visionnaire et novateur comme de Gaulle et de tristes bonapartistes conservateurs pur-jus comme
    Chirac ou son clone dégénéré. Non, non, je ne parle pas de Villepin. De la même manière, celui qui relie Jaurès à Mitterrand et son clone dégénéré (non, non, je ne parle pas de Fabius) tient plus de la mythologie que de l'étude politique.

    Le centre subit une modification majeure depuis que les pieds nickelés (Chichi, Villepote et Juppignol) ont essayé de l'assassiner en 2002 avec la création de l'UMP, remède prétendument infaillible à leur impuissance naissante et qu'ils ont fini par prendre en suppositoire à la nitroglycérine. Je sais, ce n'est pas très distingué mais cinq ans de purgatoire et d'humiliations rendent un tantinet hargneux.

    Depuis quarante ans et jusque là, le centre avait été successivement l'argument existentiel de Giscard, le refuge de toute un droite en rupture de gaullisme, un effroyable no man's land bourbeux couvert d'épaves au grés des flux et reflux droito-socialistes, et finalement, ce genre d'endroit attirant les nécrophages, il s'y était entassé toutes les variétés de charognards gras et placidement narcissiques de la création laissant, par commodité, survivre quelques héroïques ambulanciers authentiquement démocrates-chrétiens.

    Juppignol ayant balancé le bout de barbaque des investitures un peu au delà, sur la droite, toutes les infâmes bêbettes se ruèrent à la prébende dans un vacarme de plume, de griffes et de couinements. Dans une telle adversité, ne restèrent que
    les purs, les investis, en un mot, comme on dirait chez moi, les fadas. Subir les pressions subies là, subir l'ironie subie là, subir le mépris subi là, et survivre malgré tout aurait du alerter la « bulle » sur le fait que le centre n'était plus ce ventre mou de notables achetables à merci, de bourses molles sans âme ni honneur autre que celui d'exister sur un strapontin quelconque. Par le fer des abandons, par le feu des trahisons, le centre s'était purifié et trempé comme une bonne lame
    qu'il eut été criminel de laisser inutilisée. Et ça, il n'y avait aucune chance pour que cela arrive car cette survie, le centre la
    devait, outre à l'opiniâtreté désintéressée de quelques dizaines de milliers d'irréductibles militants, cadres et élus d'élite, surtout à un homme. Pas franchement charismatique, pas franchement complaisant copain-copain, même en interne, mais un capitaine avisé à la détermination d'un Churchill, au courage incorruptible d'un Clemenceau.
     
    On est en droit de penser qu'un homme qui passe à deux doigts d'un tel naufrage et amène ses idées vers une telle résurrection est le mieux à même de gouverner un pays.

    Traditionnellement le centre était libéral, plutôt social, humaniste et atlantiste. Il est en passe de recevoir un souffle nouveau. Le gaullisme, orphelin de tout courant authentique identifiable, trahi hier, méprisé aujourd'hui par ses supposés héritiers, ne demande qu'à s'incarner. Quelles sont ces valeurs qui errent comme une âme en peine ? Citons Seguin : « le
    Gaullisme, c'est l'interdiction des dérives droitières ». Le Gaullisme c'est l'amour de la France, pour ce qu'elle est et pour ce qu'elle n'est pas, comme elle pourrait être sans renier ce qu'elle est. C'est la certitude que le volontarisme politique en matière d'économie est profitable à notre mentalité propre. C'est la volonté absolue et définitive d'indépendance nationale face à quelque puissance ou modèle que ce soit. C'est la volonté de dépasser les clivages pour affronter les problématiques de longue haleine. C'est la certitude d'une obligation d'équilibre entre les valeurs travail et capital. C'est le refus des facilités trompeuses et le choix des solutions courageuses et ambitieuses. C'est l'honneur, la droiture et l'honnêteté dans la conduite des affaires publiques.

    Ces valeurs ne sauraient s'incarner dans le magnétisme hypnotique d'un flûtiste de génie, pas plus que dans la séduction d'une Circé prisonnière de ses propres sortilèges.

    Ces valeurs, l'homme susceptible de les porter au plus haut à l'heure actuelle, c'est François Bayrou. Le Gaullisme retrouve la place qu'il n'aurait jamais du quitter : le centre.

    Le centrisme mou, objet politique non identifié d'opportunistes tourneurs de veste est mort. Vive le gaullo-centrisme.

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